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Système monétaire - Ecomonétarisme 1

Ecomonétarisme

Explications (1) selon Brieuc Le Fèvre

Par écomonétarisme, nous entendons le système monétaire propre à l'écosociétalisme, qui est lui-même l'architecture économique propre à la société sociétale. L'écomonétarisme est donc un système monétaire sociétal, et se trouve au coeur de la seule l'alternative socio-économique aujourd'hui crédible pour remplacer le système capitaliste ultra-libéral.

Pour entrer dans l'écomonétarisme avec quelque chance de le comprendre, il faut commencer par abandonner tous nos préjugés, toute notre culture, toutes nos croyances et certitudes actuelles sur la monnaie, car l'ensemble des concepts présents n'est applicable qu'aux monnaies capitalistes. La monnaie écosociétale est tout autre, et, hormis le nom de monnaie et la fonction d'échange, elle ne possède rien de commun avec les monnaies capitalistes.

En particulier, la monnaie écosociétale, appelée le "merci", ne possède pas de valeur en elle-même, ce qui interdit tout jeu boursier où elle pourrait s'échanger, se coter, s'achèter et se vendre. La monnaie écosociétale n'a de valeur que parce qu'elle permet d'acheter un bien ou un service, que parce qu'elle est, dès l'origine, la contre-partie d'un travail.

De fait, l'écomonétarisme propose que chacun, pour son travail, reçoive une certaine quantité de mercis, créés pour l'occasion. Cette rémunération est variable en fonction de critères écosociétaux (utilité, pénibilité, dangerosité du travail, qualification du travailleur), et surtout indexée sur le temps. Le travail lui-même, ou plutôt la production résultante a pour prix de vente brut la somme des mercis reçus par le producteur pour le réaliser. Ainsi, il y a sur le marché juste autant de monnaie en possession des citoyens que la valeur des production disponibles.

La monnaie reste dans le portefeuille électronique de chaque travailleur jusqu'à ce que celui-ci décide d'acquérir quelque chose, bien ou service. Alors, la monnaie est purement détruite, effacée. En effet, la monnaie "dépensée" à cette occasion correspond à la somme des mercis émis pour "remercier" le producteur du bien. Une fois ce bien acquis, il est retiré du marché. La monnaie ayant rempli son office, elle n'a plus lieu d'être. Elle est donc détruite.

Le principe écosociétal de création/destruction de la monnaie fait que sans production, la monnaie, non seulement n'a pas de valeur, mais même elle n'existe pas, puisqu'elle n'est créée qu'à l'occasion d'un travail!

Pas de travail, pas de richesse, pas de monnaie symbolisant la richesse. Ce constat simple et lumineux est au coeur de l'écomonétarisme. Nous devons soigneusement le conserver dans un coin de notre esprit, car nous aurons bientôt à affronter de nouveau le lien qui subordonne le symbole à la richesse, et qui interdit au symbole d'exister quand la richesse n'est pas.

La monnaie ainsi créée à l'occasion d'un travail permet l'échange direct et immédiat entre praticuliers-producteurs, et n'est guère à ce stade qu'une amélioration du troc. Elle doit donc trouver le moyen de répondre également aux nombreux transferts de matières et produits du monde industriel d'aujourd'hui. Nous pouvons y arriver, mais à condition là encore de rejeter vigoureusement nos réflexes capitalistes.

L'écosociétalisme instaure la liberté d'entreprendre sans propriété privée de l'outil de production et sans capital d'investissement. L'entrepreneur, comme dans le capitalisme, commence par établir un dossier, qui prouve que le marché existe pour la production envisagée, et que la dite production est respectueuse de l'environnement et de la société (voire est bénéfique, donc sociétale). Dans ce cas, la communauté autorise l'entrepreneur à recevoir les équipements nécessaires pour démarrer immédiatement son entreprise.

La gestion écomonétaire comptabilise tout ce qui entre dans l'entreprise (machines, consommables, matière première, équipement, mobilier, etc), et y fait correspondre le prix brut de vente de la production, avec étalement du report de prix sur la période d'amortissement présumé de chaque item. Il s'agit donc de reporter le prix de chaque bien entrant dans l'entreprise, divisé par le nombre présumé d'objets qui seront produits au cours du temps présumé de vie de l'équipement, sur le prix de chaque objet fabriqué. Il faut aussi, bien sûr, ajouter à ce prix brut de production l'ensemble des salaires versés au sein de l'entreprise durant le temps de la production de l'objet (par exemple: 10000 mercis quotidiens de salaire, 1000 objets fabriqués par jour, prix de vente brut de l'objet, hors amortissement: 10 mercis).

L'écomonétarisme est donc organisé pour pouvoir "transférer" sur le prix de vente final l'ensemble des mercis utilisés pour transformer une matière première en objet fini. Il est par conséquent possible d'appliquer le schéma de création/destruction de la monnaie présenté ci-dessus à chaque étape de la transformation impliquant un travail humain, y compris la fabrication des machines, des outils, des bâtiments, etc.

Le consommateur final paiera, au total, une somme de mercis qui correspondra assez fidèlement au nombre d'heures de travail qui auront été nécessaires pour produire l'objet convoité, puisque chaque intervenant est payé en relation directe avec son temps de travail.

En conséquence du report des amortissements sur le prix de vente final, ce sont les consommateurs qui détruisent, in fine, la monnaie créée pour remercier les travailleurs qui ont fabriqué les machines, équipements, consommables, etc. L'entreprise, elle, les a reçus sans rien débourser, et n'est donc en rien propriétaire de ses outils; elle n'en est que le dépositaire, sous contrat avec la communauté. L'entrepreneur n'est donc pas propriétaire de son entreprise, mais il n'est pas non plus responsable financièrement en cas de problème! Il est un salarié comme les autres, dont le rôle est d'organiser au mieux le production.

Cette situation, éventuellement moins gratifiante sur le plan personnel, est aussi beaucoup plus reposante, et permet d'envisager des actions qui, pour la capitalisme, seraient qualifiées de "risquées". En effet, l'écomonétarisme supprimant le recours aujourd'hui obligatoire à des fonds d'investissement privés, et libérant de ce fait l'entreprise aussi bien de la nécessité de remboursements à échéance que du contrôle absolu d'actionnaires anonymes, rend au chef d'entreprise toute sa liberté de mouvement quant à ses choix stratégiques.

Ce schéma de production est cohérent et satisfaisant, mais ne prend pas en compte le fait qu'une grande partie de la population ne travaille pas encore, ne travaille plus, ou bien ne peut travailler, pour quelque raison que ce soit. Sachant qu'il est impossible de créer du symbole monétaire sans contre-partie réelle, comment permettre la répartition de la richesse commune entre tous les membres de la société?

Le capitalisme crée des taxes. L'écomonétarisme crée le transfert de valeur, bien supérieur à la taxation en ceci que la somme des symboles distribués (la monnaie) ne dépend pas de la production, ce qui implique que la monnaie n'est jamais trop rare. Par contre, le pouvoir d'achat des symboles sera fonction de la quantité de biens produits. Ceci est exactement le contraire d'une taxe, dont le montant dépend de la production, mais qui ne fait pas varier le pouvoir d'achat des symboles.

Notre transfert de valeur est appelé ainsi car il transfère sur les biens produits la valeur des symboles créés pour celles et ceux qui ne travaillent pas. Cette monnaie constitue le Revenu Sociétal, qui est unique et inaliénable pour tous les humains, sauf les enfants pour lesquels il est proportionnel à l'âge (besoins croissants avec l'âge).

L'écomonétarisme possède donc une "anti-taxe" unique, le Transfert EcoSociétal?, que nous appelons toutefois, par souci de compréhensibilité "Taxe EcoSociétale" ou TES, qui permet en fait de "diluer" le pouvoir d'achat des travailleurs, en en donnant un peu aux non-travailleurs. Ce Revenu Sociétal, aussi appelé "viatique", est donc de la monnaie créée sans travail, ce qui semble contraire à notre principe primordial: pas de symbole sans richesse. Sauf que, par le jeu de la TES, les dits symboles sont désormais "assis" sur la richesse.

Comme conséquence, il y a qu'une société écosociétale ne saurait faire vivre ses membres du seul viatique. En effet, si il n'y a pas de travail, donc pas de richesse, les symboles pourront toujours être créés, mais ils n'auront pas de pouvoir d'achat. Ce sera de la monnaie de singe. Ainsi, par un mécanisme auto-régulateur, une société qui verrait son activité ralentir verrait parallèlement le pouvoir d'achat de ses symboles diminuer, ce qui imposerait à ses membre de travailler pour en acquérir plus (car le salaire s'ajoute au viatique). Par suite, la richesse augmente, donc le pouvoir d'achat des symboles aussi.

Mais allons encore un peu plus loin. Puisque l'écomonétarisme permet de créer des symboles monétaires en les "asseyant" sur la richesse, il va être possible de créer des revenus pour du travail qui ne crée pas de richesse marchande, palpable, commerciale. C'est-à-dire qu'il est possible de fonder une société civilisée complète en finançant l'indispensable service public. En effet, par le jeu du TES, il est possible de transférer sur la richesse "marchande" la valeur des symboles créés pour remercier tous ceux qui travaillent au service de la communauté, comme les médecins, les infirmières, les professeurs et éducateurs, les chercheurs, les artistes, etc.

Toutes les personnes qui travaillent pour l'ensemble de la communauté reçoivent de la monnaie, laquelle sera in fine détruite par la consommation de biens et de services par l'ensemble de la même communauté. L'écomonétarisme est un système économique réellement solidaire, puisque les producteurs de biens et services "marchands" construisent, en travaillant, l'assise du TES. Par suite, ils permettent de remercier, par la création de monnaie, les producteurs de biens et services "non marchands" dont tous profiteront (routes, ponts, réseaux d'eau, de télécom, d'électricité, hôpitaux, garderies, personnel d'accompagnement, de santé, etc).

Ces quelques lignes ont déjà défini l'essence de l'écomonétarisme, et les bases d'un système sociétal. En effet, il suffit désormais d'énoncer ces trois règles simples pour inventer l'écosociétalisme:

(1) Le salaire est proportioné à la sociétalité de la production, et maintenu dans une fourchette de 1 (salaire de base) à 3 (salaire maximum), afin d'éviter la création de profondes inégalités anti-sociétales, sources de conflits.

(2) Le TES est proportionné à la sociétalité de la production, de telle sorte que les productions les plus sociétales soient favorisées.

(3) Le viatique est fixé de telle sorte qu'il permette une vie digne à ceux qui ne vivent que de cette monnaie (nourriture, vêtement, logement).

Le détail des manières de fixer les salaires et le TES, ou encore le montant du viatique ou la façon de le calculer, ainsi que les biens et services entrant dans le "service public", peuvent être variables d'une communauté à l'autre. Mais le noyau dur, incontournable, de l'écosociétalisme est bien là: l'écomonétarisme fonde le seul système socio-économique post-capitaliste qui soit aujourd'hui crédible.

Date de création : 09/12/2009 : 07:34
Dernière modification : 09/12/2009 : 07:40
Catégorie : Système monétaire
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